Image tirée de : http://membres.multimania.fr/affichagelibre/
La thèse énoncée dans le titre de ce billet mériterait des pages et des pages. Elle m'est venue à force de côtoyer des artistes non conventionnels, à force de m'essayer à la culture de la musique libre, ou encore du punk. Je n'ai pas pour ambition de l'étayer ici d'arguments, tant cela serait illisible et tant elle tout encore trop flou pour être bien formulé.
Toujours est-il que j'ai un premier exemple.
Je laisse ici la parole aux artistes et habitants de la friche rvi, ancienne usine Renault Véhicule Industriels, occupée tout d'abord de manière illégale avant de voir la mise en place d'une convention entre la dite mairie et le CFA (Collectif Friche Autogérée) représentant l'ensemble des associations présentes sur place. Aujourd'hui, ce lieu est menacé d'expulsion, sans proposition de logement adéquate, disséminant ainsi aux 4 coins de la ville (Lyon) un lieu d'échange, de création et d'expérimentation.
L'usine Renault-Berliet de Lyon a produit des véhicules industriels
de 1902 à 1998. Depuis 2002, des collectifs de toute sortes occupent ces
hangars.
Aujourd'hui les lieux sont transformés de fond en comble
jusqu'à ressembler à un incroyable village abritant militants, artistes,
dissidents et autres rêveurs de toute sorte
Aujourd'hui la mairie tente d'expulser ce lieu unique même si il faut
pour ça rompre les conventions établies et ne faire peu de cas de leur
propre législation
Le Grand Lyon possède un parc immobilier vacant immense. Ils ont la capacité de reloger 12 friches sans difficultés.
Pour autant ils ne proposent qu'un bâtiment de 3500 m². Bâtiment qui,
publiquement, servira d'alibi face à l'opinion et qui, réellement,
relève de l'absurdité.
Cette volonté de disperser et de dissoudre la force de la Friche RVI est assez simple à comprendre.
Nous ne voulons pas être rentables et, en cela, nous ne pouvons en aucun
cas satisfaire les ambitions individuelles des acteurs de cette
politique.
Plus profondément dans notre société actuelle, société de
surveillance, société d'uniformisation, société d'hopitaux-prisons, de
prisons pour mineurs, de prisons pour étrangers, etc... « Leur » culture
ne doit être qu'un divertissement marchand et rien d'autre.
Toute forme d'intervention ou de création qui parle de sentiments, de
sensations, d'espaces, de temps, de son, d'humour, d'images, etc...
n'ont pas intérêt a s'aventurer imprudemment sur un plan social et
politique.
Volontairement ou non, nos pratiques déstabilisent « leur » projet :
celui de fabriquer des travailleurs responsables au service d'une élite.
C'est une attaque en règle contre nos pratiques, nos modes de vie et nos espoirs.
On ne peut pas dissocier cette annonce de dernière minute de la
politique actuelle d'aseptisation de la ville (la gentrification des
dernières « zones sensibles » du centre-ville, les rafles de sans
papiers et les expulsions express d'habitats squattés)
Quelle vérité se cache derrière ce projet de délocalisation dans la
périphérie lointaine, si ce n'est de bouter hors de la cité des
indésirables crève la faim?
Les élus évoquent, sans aucune garantie,
la multiplication des « sites de stockage » éloignés des uns des autres
et sous-entendent, au détour d'une phrase, leur volonté d'assigner
l'espace à chaque type de pratique : Autrement dit, tout le monde reste
dans sa case, on ne mélange pas les torchons avec les serviettes.
Par la négation de l'interdisciplinarité, il y a la volonté de mettre en
place un cloisonnement des pratiques pour revenir à la seule vision de
l'art tolérée par le pouvoir : celle d'une expression individuelle à but
marchand.
« Qu'on garde les artistes qui produisent et qu'on se débarrasse des
autres ! » déclare Thierry Philipp, maire du 3ème arrondissement à la
presse.
Comment quantifier la productivité artistique si ce n'est en terme de rentabilité économique ?
La mairie tombe enfin le masque en donnant cette vision de l'artiste
comme producteur de richesse avant d'être « faiseur d'art ».
En
d'autres temps, le pouvoir brûlait publiquement les œuvres jugées
subversives. Aujourd'hui, la méthode est à peine plus subtile : on
bétonne, on démolit à coup de pelleteuse et on délocalise dans un
placard à balai les bons élèves où ils finiront tranquillement leur
processus de soumission déjà bien entamé, et on expulse la plèbe au fond
du caniveau.
« Quand on vient sans projet, ça s'appelle squatter ! » nous dit encore Thierry.
Loupé camarade, squatter c'est déjà un projet à part entière !
Mais
pour les élus, le bénéfice est double : on se donne la caution de
mécène au grand cœur en relogeant une partie du projet, et on se
garantit au retour les espèces sonnantes et trébuchantes des artistes
professionnels, responsables et fréquentables.
En ce qui nous concerne, nous ne sommes pas dans une situation de
discussion ou de dialogue puisque si ils voulaient nous écouter ils
proposeraient des choses moins insultantes pour permettre de continuer
ce qu'est la Friche RVI.
Il est donc inutile de se placer dans la demande.
Nous proposons
plutôt de dire et de tenir le fait que nous ne partirons pas. Notre
force étant une capacité d'organisation collective, notre immense réseau
de connaissances, la puissance de nos imaginaires.
Si, après ça, la triste preuve est faite qu'il nous est impossible de
conserver un espace physique dans notre ville alors nous inventerons
d'autres manières de faire exister ce que nous sommes.
La Friche RVI a été acquise par la lutte,...... pour la garder...... seule la lutte payera !!!
Restez à l'écoute, des actions restent à prévoir....
Texte issu de membres du collectif Réso, basé à la friche rvi. J'ai hésité à souligner des passages...Je vous laisserai dégager les choses importantes.
Toutes informations supplémentaires sur la friche, sur ce qu'il s'y passe (en ce moment notamment) sont disponibles sur leur site internet : http://www.friche-rvi.org/
M.